L'édito de La Lettre n°8

Pendant près de trois semaines, la France a vécu au rythme des « voitures brûlées » et des images de violence retransmises chaque jour par la télévision. 
Au moment d’écrire cet éditorial, je me suis dit : « Faut-il revenir là-dessus ? Après tout, tout cela est derrière nous. Du moins, je l’espère… ».
Et puis, j’ai aussi pensé qu’il serait trop facile, trop simple, trop simpliste de « faire l’impasse » sur la grave crise qui a secoué notre pays. Car, si rien n’est fait, les mêmes causes peuvent reproduire les mêmes effets.
Alors, voici, brièvement, ma position.
● D’abord, je pense qu’il ne faut jamais justifier des violences qui portent atteinte aux personnes et aux biens. Celles-ci relèvent du Code pénal, qui prévoit les sanctions appropriées. Ce code doit être appliqué. Ces sanctions doivent être décidées. Je préfère la stricte application des lois républicaines (le Code pénal est un ensemble de lois) à la décision de faire perdurer des régimes d’exception.
● En second lieu, on ne peut méconnaître les vrais problèmes qui se posent dans beaucoup de quartiers de notre pays. Et pour moi, le premier problème est celui du chômage des jeunes. Il est certains secteurs, dans le Loiret comme dans toute la France, où le taux de chômage des jeunes est passé en cinq ans de 25 % à 40 % ! On peut comprendre que des jeunes qui connaissent le chômage avant même qu’aucun emploi ne leur ait été proposé vivent dans l’angoisse. Rien ne me paraît plus urgent que de faire en sorte que tout jeune se voie proposé ou une formation ou un emploi ou une activité utile à la société ou un parcours d’insertion professionnelle crédible. Ce doit être une vraie priorité. Les « emplois jeunes » ont été supprimés. On nous dit maintenant que ce fut une erreur. Revenons là-dessus. Peu importe les appellations : il est mieux de proposer à un jeune, pendant plusieurs années, une activité utile à la société et formatrice qui lui mette « le pied à l’étrier » que de le laisser dans l’inaction et la désespérance.
● Je l’ai écrit il y a huit ans sans mon rapport Demain la ville puis dans mon livre Changer la ville : les quartiers dits sensibles, en voie de « ghettoïsation », doivent être non pas ravaudés, mais refaits. Ce qui suppose qu’on crée d’abord des logements sociaux de qualité en nombre suffisant bien intégrés dans tout le « tissu urbain » de nos communes. On m’a dit il y a sept ans que ce que je proposais coûtait trop cher. J’avais dit alors que si l’on refusait de faire de ce projet une réelle priorité financière, cela coûterait plus cher demain. Je persiste et signe.

Je reste à votre disposition pour dialoguer sur ces sujets et tous les autres.

Je vous souhaite à toutes et à tous de bonnes fêtes de fin d’année et vous présente tous mes voeux d’heureuse année 2006
 

Jean-Pierre SUEUR

 

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