Jean-Louis Rizzo, qui fut adjoint au maire d’Amilly, professeur au lycée de Montargis et à l’Institut d’études politiques de Paris, et qui est docteur en histoire contemporaine, est un historien d’une grande probité. Ses livres se caractérisent par leur sérieux. Ils témoignent d’une volonté de restituer l’histoire – et ceux qui la font – le plus justement possible, sans asservir la réalité à une thèse, une doctrine ou une idéologie. Il explique, analyse, permet de comprendre l’histoire, persuadé qu’il est – car il reste un pédagogue – que cette compréhension est indispensable pour déchiffrer le présent et préparer l’avenir.
Dans ses ouvrages, il s’est notamment – et même particulièrement, faut-il écrire – penché sur l’histoire du radicalisme. Aussi lui doit-on deux livres sur la grande figure de Pierre Mendès-France.
Le livre qu’il nous propose aujourd’hui est consacré à une figure moins connue, moins flamboyante aussi (encore que Mendès préférait les actes et le réalisme au lyrisme exacerbé), celle d’Albert Sarraut, dont beaucoup ignorent qu’il fut, sous la troisième République, député durant vingt-deux ans, sénateur durant quatorze ans, qu’il appartint à vingt-cinq gouvernements – pas moins ! – et en dirigea deux.
Du dreyfusard qu’il fut très tôt au président de l’assemblée de l’Union française qu’il fut sous la quatrième République, Jean-Louis Rizzo nous livre avec une grande objectivité les lumières et les ombres d’un très long parcours politique. Il nous éclaire sur la prudence de Sarraut sous le Front populaire, sur sa complaisance à l’égard du régime de Vichy durant ses premières années, sur son courage lors de ses dix mois de déportation à Neuengamme. Il nous éclaire sur sa conception de la décolonisation : il « ne colle pas aux idées assimilatrices » et « comprend assez vite l’aspiration des peuples dominés. » Il nous éclaire enfin sur ce que représente pour lui le radicalisme : le sens de l’État, l’attachement à la République, la laïcité, le refus des extrêmes, « la défense d’’un progrès social graduel », l’union d’un état d’esprit « très girondin dans l’Aude », mais « très jacobin dans la capitale… »
On voit ainsi combien Jean-Louis Rizzo nous offre une fois encore un vrai travail d’historien ce qui est déjà beaucoup.
Jean-Pierre Sueur
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Albert Sarraut. Au cœur de la République parlementaire et coloniale, éditions L’Harmattan, 26 €