Je suis frappé par toutes les réactions et par la véritable incompréhension que suscite la suppression du timbre rouge !
Je mesure – une fois encore – combien la Poste est une institution républicaine, qui fait partie de notre patrimoine.
Je me la représente toujours comme un service public – j’y tiens ! – et comme un lien entre les Français. Le passage quotidien du facteur en est la manifestation la plus évidente.
Je n’ignore pas que les temps changent et que le grand développement des mails et des SMS a pour effet de réduire le volume du courrier. Et je comprends que la Poste doive prendre en compte cette évolution.
Mais la suppression du timbre rouge ne me paraît pas être le bon remède. Tout au contraire.
La Poste nous explique que pour envoyer une lettre « urgente » – c’est-à-dire susceptible d’arriver le lendemain –, il faudra pianoter sur son ordinateur ou scanner la lettre manuscrite et enfin payer en ligne, etc.
Mais c’est oublier que nombre de Français n’ont pas d’ordinateur, ou n’ont pas les compétences nécessaires pour accomplir ces manipulations.
Il y a dans notre pays une vraie « fracture numérique ».
Et quand on nous répond que nos concitoyens qui n’ont pas d’ordinateur, ou ne pourront pas s’en servir, seront accueillis dans les bureaux de Poste où on saisira leur missive, où on la « tapera » et l’enverra, je comprends que beaucoup soient réticents et craignent qu’on ne puisse, dans ces conditions, respecter la confidentialité, l’intimité de leurs courriers.
Je pense qu’il serait sage de revenir sur cette décision incomprise.
Je crains de ne pas être entendu. Mais j’ajoute que la suppression du timbre rouge, auquel se substitue ce processus complexe, c’est exactement le genre de mesure qui donne le sentiment à nos concitoyens qu’ils sont délaissés, incompris, dans les petites communes et le monde rural notamment, mais aussi dans les quartiers de nos villes.
Et il n'est pas difficile de comprendre que ce sentiment d'abandon, de délaissement a quelques conséquences politiques…
Qu’on m’entende bien : que la Poste doive se moderniser, aller de l’avant, prendre en compte les données nouvelles, oui ! Mais l’on peut – et je peux – écrire cela tout en considérant qu’une mesure aussi mal comprise que la suppression, dans ces conditions, du timbre rouge, entraînant les conséquences que je viens d’évoquer, est une erreur.
Jean-Pierre Sueur