Patrice-de-La-Tour-Du-Pin_796Merci à Marie-Liesse d’Aboville et à sa famille d’avoir, ouvert les portes du château du Bignon-Mirabeau où vécut Patrice de La Tour du Pin, et de nous avoir offert une conférence et des lectures par de jeunes comédiens passionnés de textes de ce poète trop méconnu – y compris dans le Loiret -, autour d’une imposante « Somme poétique » (trois volumes chez Gallimard) qui mérite vraiment d’être lue et relue. J’y reviendrai plus longuement. Permettez-moi de citer dès aujourd’hui deux extraits de son œuvre.
L’un est dédié aux cantons de Ferrières en Gâtinais et des alentours (il s’agit de quatre strophes du poème « Départ de Jean Flaterre »)

« Ceux du Bignon, de Rozoy, de Châlette,
Ceux de l’Anche et du Moulin de Misou,
Ceux de la Borde et la Marquette
De Mardeleuse ou de n’importe où,
- Vous m’avez connu sans savoir la Quête
Que j’essayais de mener parmi vous.

Pour le bonheur de citer vos présences,
Pour le plaisir d’épeler vos noms,
Je m’abandonne à ma complaisance
Et reprends terre à mon meilleur fond,
Avant que Jean de Flaterre s’élance
Vers d’autres champs avec mon pavillon » (…)

Toi qui naquis aux Mardelles de feu,
(L’eau n’y dort plus et le feu ne s’élève…)
Qui t’amusais près du Noyer-Angleux
Et sur les bords des Champs-de-Genièvre,
(Les noyers ont dû mourir bien trop vieux,
Et les genévriers poussent en rêve…)

Toi qui dormis dans la Vigne-aux-Nouplées
(Où sont les vignes et ses vendangeurs ?)
L’aventurier dont tu pris la foulée,
(Etait-il de ces lieux ou d’ailleurs ?)
Te mène hors de mon domaine étoilé
Vers les domaines des autres cœurs »


L’autre citation est extraite du « Poème d’amour » :

« Je l’ai portée à travers les landes, à travers
Un grand château jusqu’à sa chambre. Je peux
Retrouver dans les dunes de sable des hanches
Ou sa poitrine, et même son parfum de chair
Douces dans les  prairies. Comme tout amoureux,
Je l’ai menée aux vallées les plus désolées
De mon âme, où jamais femme n’est allée,
Et c’est elle qui les habite… Elle connaît
Tous mes jours et mes nuits, c’est elle qui les fait
Et les défait ; elle entre d’un battement de cœur
Et sort d’un autre ; entre deux, le bonheur
Du ciel est arrêté, d’une sorte de danse
Arrêtée. J’ai tenu hier l’un de ses seins
Dans ma main refermée ; et mon âme qui change
Toujours de paysage, a conservé sans fin
Un grand ciel pâle où tremblaient des étoiles blanches… ».


Puissent ces deux citations vous donner le désir de lire l’œuvre de Patrice La Tour du Pin…

Jean-Pierre Sueur

 

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