Selon un sondage récent, d’ailleurs) qui fût sereine. On n’échappe pas aux polémiques, aux procès, à la mauvaise foi, aux coups fourrés. Les Français qui ont, plus qu’on ne le dit, la tête politique, font depuis longtemps la part des choses. Cela étant dit, comment ne pas être frappé par le côté délétère de ces semaines de précampagne. Ce climat n’est pas chose anodine dans un temps de crise profonde, où il faudra beaucoup de courage pour trouver et mettre en œuvre les vraies réponses.
Mes propos seront forcément partisans. Comment ne le seraient-ils pas ? Mes engagements sont connus et mon soutien à François Hollande est clair et déterminé.  « Partisan » ne signifie cependant pour moi ni « simpliste » ni « sectaire », n’ayant, depuis toujours, aucune affection pour ces deux qualificatifs.
J’observe, du côté de Nicolas Sarkozy, une logique de fuite en avant. Que le président en exercice s’applique à exercer sa mission jusqu’au dernier jour est évidemment légitime. Mais comment comprendre qu’il défende soudainement, quatre mois avant l’échéance, des propositions qu’il pourfendait naguère et auxquelles le gouvernement s’opposait avec la dernière énergie il y a moins d’un mois ? Ainsi en est-il pour la taxe sur les transactions financières. Il n’est certes jamais trop tard pour changer d’avis et aller dans le bon sens, mais enfin ! Pire, la TVA sociale, toujours pourfendue par le même Nicolas Sarkozy, se voit soudainement prônée, alors qu’il n’y a évidemment aucune chance pour que cette mesure, dont les effets seraient négatifs pour le pouvoir d’achat, puisse être mise en œuvre avant les présidentielles. Quant à l’emploi et à la reconquête de pans entiers de notre production industrielle, est-il crédible d’annoncer à cent jours de l’échéance, ce qui aurait pu – et dû – être fait depuis cinq ans ?
Ce n’est certes pas la première fois qu’un pouvoir en place utilise de manière ultime les leviers du pouvoir pour tenter de survivre en frappant fort l’opinion. Ce fut rarement pour le meilleur et souvent pour le pire. Je ne fais aucune comparaison, mais je me souviens d’Ouvéa.
Il y a, évidemment, la crise, ou plutôt les crises, qui ont contraint tous les gouvernements du monde à revoir leurs politiques. Mais dans le cas qui nous occupe, il ne s’agit pas seulement de révision. Nous avons le tournis. En cinq ans, Nicolas Sarkozy aura défendu, sur des points essentiels, tout et le contraire de tout. Ce n’est que sur les privilèges fiscaux que rien – hélas ! – ne l’aura fait varier.
Voilà pour le fond. Reste la forme. Et sur la forme, je tiens à dénoncer la logique des « snipers ». Il paraît qu’il faut taper, taper, taper encore sur l’adversaire, par des « petites phrases » excessives, souvent ridicules, qui doivent frapper l’opinion. C’est dérisoire. Et quelles qu’en soient les limites, le résultat du sondage par lequel nous commencions ce texte montre que les Français ne sont heureusement pas dupes.
Ils connaissent la vérité. Le prochain président et le prochain gouvernement devront faire preuve de courage, de réalisme, de ténacité – et d’abord de solidarité. Car les mesures qu’il faudra prendre pour relever le défi des crises actuelles ne pourront être acceptées par les Français que si elles sont justes.

Jean-Pierre Sueur

 

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