jean-ferrat-jpg_10155Merci à Jean Ferrat d’abord, où les joyaux voisinent avec des pages imbuvables et pour tout dire, inacceptables. Mais je retiens, bien sûr, ses flots de poésie qui vivront toujours.
Sans Jean Ferrat, plusieurs des plus beaux chants d’amour d’Aragon n’auraient pas été connus comme ils le sont aujourd’hui. Soyons juste : il faut aussi remercier Léo Ferré, Catherine Sauvage et quelques autres.
Mais Jean Ferrat a fait sur ces poèmes un travail d’artiste et d’artisan, un travail méticuleux où chaque mot, chaque rythme, chaque scansion, chaque sonorité, chaque rime compte. Il a fait un travail d’orfèvre.
Les sons ne sont pas plaqués sur les vers. Jean Ferrat retrouve, découvre, invente la musique intime qui est au cœur de l’écriture. Si bien que la musique et les mots sont devenus pour nous indissociables. Et que Jean Ferrat fut un formidable ambassadeur de cette poésie.
J’ajoute qu’il y a foison de chansons encore méconnues. Ainsi celles que contient l’album de 1995 entièrement consacré à Aragon et qu’il faut écouter ou réécouter. Je pense particulièrement à la Complainte de Pablo Neruda, à Chagall et à ce texte si fort publié dans le recueil Les Poètes et que Jean Ferrat a rebaptisé Epilogue.
Jean Ferrat, c’est aussi la révolte contre l’injustice.
C’est encore Nuit et Brouillard, un chant dont la diffusion – on a du mal à la croire – fut « déconseillée » sur les ondes des radios et télévisions publiques.
C’est encore Ma France et La Montagne.
Y songeant, je me dis que Ferrat a infiniment mieux dépeint des pans entiers de « l’identité française » que tous les discoureurs des derniers mois.
Le public ne s’y est pas trompé, ne s’y trompe pas.
… Et puis Jean Ferrat, c’est encore l’Ardèche. Connaissant bien, pour des raisons familiales, la Haute-Ardèche, je sais, comme chacun, combien il a parlé de ces montagnes avec justesse.
Merci à mon ami Michel Teston, sénateur de l’Ardèche, habitant d’Entraigues, de nous avoir guidé en cette commune parmi ses compatriotes au grand cœur, - « noueux comme un pied de vigne ».

Jean-Pierre Sueur
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