L'analyse de Jean-Pierre Sueur La première constatation que l’on peut faire après les élections européennes est que les Français se sont saisis de leur bulletin de vote européen, comme hier de leur bulletin de vote régional, pour sire leur désaccord avec la politique qui es actuellement menée par le Gouvernement.
On peut feindre de ne pas entendre ce message et expliquer – cela a été fait dès dimanche soir – qu’il ne s’agit « que » d’un scrutin européen, comme il ne s’agissait hier « que » d’un vote régional. On peut regretter que les scrutins ne soient pas limités à leur seul objet.
Mais c’est ainsi. Les Français se saisissent de l’occasion de voter qui leur est proposée. Ils s’expriment, c’est la démocratie.
Et c’est toujours faire une mauvaise politique que de ne pas entendre les messages du corps électoral ou de feindre qu’ils n’existent pas, ou que leur objet est autre.
La vérité, c’est que d’autres choix politiques sont demandés, qu’ils sont nécessaires, et que ce serait une erreur de n’en tirer aucune conséquence.
La réforme est – c’est vrai – toujours difficile. Je crois pourtant que les Français peuvent comprendre que des réformes sont nécessaires et qu’ils peuvent y souscrire. Mais à condition que l’effort soit justement partagé. Ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui avec, pour ne prendre que cet exemple, le projet de réforme de la Sécurité sociale.
Seconde constatation : le taux d’abstention est important. Il l’a été aussi dans nombre d’autres pays d’Europe. Construire l’Europe n’a jamais été, et ne sera pas, facile. L’Europe n’est pas la voie de la facilité. Mais c’est une grande chance. La chance pour nos pays de peser vraiment dans le monde tel qu’il est, défendre des valeurs fortes, d’œuvrer pour la paix. Le taux d’abstention d’aujourd’hui ne doit pas nous décourager, il ne doit pas nous détourner du chemin. Il montre que la tâche est ardue, qu’il faudra beaucoup de volonté, de force de conviction. Beaucoup de dialogue aussi. Beaucoup de sens de l’écoute. Il est nécessaire de faire l’Europe. Mais on ne fera pas l’Europe sans les Européens.
Jean-Pierre Sueur