Dans le cadre du Festival des Orgues en Pays Loire-Beauce fut interprété pour la première fois le 10 octobre dans l’église de Cravant, par la soprane Chloé Jacob, un poème de Christophe d’Arnell intitulé Une petite Beauce, mis en musique par Gildas Harnois, qui accompagnait Chloé David sur le remarquable orgue « Cavaillé Coll » de Cravant. Je publie ci-dessous le texte de ce poème inédit.

Jean-Pierre Sueur

Une petite Beauce de Jean-Christophe d'Arnell (avril 2020)

Comme le souffle exquis d’un tilleul en exil,
Héroïque, son âme inventait d’autres ciels
Radieux au chevet de chapelles intimes,
Infinis de douceur pour les blés en sommeil.
Ses chemins conduisaient aux rivages fragiles,
Ténébreux et sacrés de l’enfance éternelle.
 
Ses vagues façonnaient d’ondoyantes collines
Gisants de chaume et d’or, au visage vermeil.
Sa tristesse, parfois, troublait l’encre docile
Des Mauves-reposoirs, dont les bras en tonnelles
Gansaient l’astre des nuits d’une moire divine :
Immarcescible écrin de lumière et de grêle.
 
II régnait en son cœur, l’espérance et l’abîme
L’obscure éternité de la plaine d’Ukraine
Et le bel unisson de nymphes sibyllines
Auréolées de fleurs et de feuilles pérennes.
 
Son prodigue murmure, au détour d’une vigne
Annonçait un orage, un élan fraternel
De faunes musiciens, ivres de joies infimes,
D’antiques symphonies et de fugues rebelles.
 
Son horizon, présage de riches avrils
Apprivoisait la brume et sa nacre de gel,
Et transformait l’hiver en bouquets d’églantines,
Seringas et lilas aux parfums irréels.
 
Et l’aube célébrait la présence subtile
Des siècles en cortège et des Mânes fidèles
En exhumant de l’ombre, un odéon d’argile,
Une Petite Beauce, à tout jamais, Eden