Il est un argument, sans fin ressassé, au sujet de la réforme des retraites, qui me paraît être sans fondement. C’est celui selon lequel, en votant pour Emmanuel Macron, les Français auraient ratifié son programme et donc la retraite à 65 ans.
La réalité, on le sait, est tout autre. Nous sommes nombreux à avoir voté pour Emmanuel Macron afin de faire barrage à Marine Le Pen, et non pour son programme. D’ailleurs, dès le lendemain de son élection, Emmanuel Macron en est convenu et a annoncé qu’il en tiendrait compte.
Michel Rocard avait annoncé que la réforme des retraites pourrait faire se fracasser au moins cinq gouvernements.
Il y a eu une exception, rappelée ce dimanche sur France Info, par Jean-Marc Ayrault, ancien Premier ministre, et mise en œuvre par Marisol Touraine qui a pu faire évoluer les choses au terme de vraies et longues concertations.
Je regrette, pour ma part, que l’idée d’un système universel ait été abandonnée lors du quinquennat précédent. Car cela aurait sans doute constitué le dispositif le plus juste possible, même si sa mise en œuvre n’aurait pas été facile.
Le projet désormais présenté se heurte à l’opposition de toutes les confédérations syndicales, sans exception.
La question de l’âge légal est, bien sûr, centrale dans cette opposition.
D’autres sujets suscitent également oppositions et incompréhensions, et ils doivent être revus. Je pense à la pénibilité, à la durée de cotisation, à l’espérance de vie en bonne santé, à la situation des femmes qui vivent de lourdes inégalités, en raison notamment des interruptions dans leur parcours professionnel, et au travail des seniors.
Le gouvernement semble avoir choisi de passer en force. Ce serait une erreur. Il est encore temps  –  plus que temps  –  pour la concertation et la négociation.
Jean-Pierre Sueur