C’est avec joie que je reçois le catalogue que vient de réaliser l’architecte Dominique Lyon, qu’il a choisi d’intituler, très sobrement, Vingt réalisations.
On le sait, Dominique Lyon fut l’architecte de la médiathèque d’Orléans, qui tient une large place, au cœur de cet ouvrage essentiellement constitué de photos, mais précédé d’un manifeste par lequel l’auteur de ces vingt œuvres expose succinctement sa philosophie.
« Comment justifier la présence d’une architecture ? » se demande-t-il.
À cette question, il récuse toute réponse générale, absolue, abstraite. En effet, cela serait contraire à la prise en compte des situations diverses, variées, au sein desquelles l’œuvre à venir va prendre place.
Or la réflexion doit, pour lui, naître de l’analyse approfondie des situations. Il écrit : « La société n’a pas besoin qu’on la considère en général, elle s’exprime très bien en particulier. » Il ajoute qu’à chaque projet, « la manière d’être de la société se révèle crûment : à travers le programme, les réglementations, l’état de l’espace public, la présence de l’histoire, les ressources locales, la qualité du paysage, le montant du budget, l’attitude des différents acteurs à travers leurs ambitions, leur discours, leurs revendications. Pas besoin de généraliser : le général se manifeste dans le particulier. Il s’ensuit que l’architecture est proprement stimulante quand elle tire parti de la situation. »
Et il conclut qu’« une bonne part de l’humain se manifeste par des contingences et que quand l’architecte les considère sans les subir, il retrouve la dimension humaniste de l’architecture. »
Dominique Lyon nous donne aussi sa définition de la beauté. Pour lui, le beau est « un dérangement qui nous renvoie à nous-mêmes, à notre jugement. Il assure le sujet contre l’uniformisation du monde et la marchandisation de l’intime. La beauté est une étrangère qui nous touche, un ébranlement à partir duquel se reconstruire. »
En contemplant les photos des vingt œuvres présentées – dont celles, remarquables de la médiathèque d’Orléans qui s’élève « dans un environnement disparate et agité » –, on mesure l’ascèse par laquelle Dominique Lyon, décrypte, chaque fois, une situation différente, et façonne, chaque fois, une œuvre unique, fruit d’un travail tenace, d’un effort de recherche et de concentration, pour aboutir à une esthétique singulière, racée, apurée, qui ne saurait nous laisser indifférents.
JPS