Hélène de Saint Aubert, née Hélène Baconnet, est originaire d’Orléans-la-Source. Elle y a étudié au lycée Voltaire avant d’être élève à l’École normale supérieure, agrégée, docteure en lettres après aHvoir rédigé une thèse brillante sur Paul Claudel, de se spécialiser sur les rapports entre la littérature et la Bible, d’apprendre l’hébreu et de devenir exégète.
Elle vient de publier un livre très sérieux, savant même, mais aussi extrêmement novateur* en ce qu’il vient, par un scrupuleux retour aux sources, bousculer des idées toutes faites. Il porte sur le second récit de la Création dans la Genèse (autrement dit : Genèse 2), celui qui nous présente – pour résumer – la création de la femme comme issue d’une « côte » de l’homme. La femme serait donc seconde. Elle le serait dès ce mythe originel dont on ne peut pas dire qu’il n’ait pas eu de portée ni d’effets durant un grand nombre de siècles. 
Par une analyse très serrée des mots, de l’actif et du passif, des faits d’énonciation, Hélène de Saint-Hubert démontre, preuves à l’appui, l’inanité de cette légende. Elle montre que dès son commencement, et notamment dans les fameux versets 22 et 23 de Genèse 2, c’est de l’humain dont il est question, comme une entité non encore différenciée, en tout cas au sein de laquelle aucune subordination n’existe entre l’une des parties, des composantes – entre l’un des êtres, des sexes, et l’autre. 
Elle conclut : « Qui continuerait de croire que le texte est phallocratique aurait la berlue. »
Et elle ajoute « Une approche rigoureuse de Genèse 2 met en évidence une dénonciation de la misogynie et une défense particulièrement novatrice en son temps de la parité homme-femme. »
Bien entendu, cette très courte présentation ne saurait rendre compte de toute l’analyse, extraordinairement rigoureuse, qui nous est offerte. Je renvoie les lecteurs au livre. Mais il est réjouissant que l’érudition conduise ainsi, s’agissant du féminisme, à rompre avec les archétypes, les artefacts et les légendes qui durent et perdurent et peu à peu s’imposent et s’incrustent comme des vérités qu’elles ne sont pas. 
Jean-Pierre Sueur 
* Hélène de Saint-Aubert, Sexuation, parité et nuptialité dans le second récit de la Création, Genèse 2, éditions du Cerf 2023