Jean-Pierre SUEUR intervient au Sénat sur les conséquences financières de la décentralisation et sur les évolutions récentes du gouvernement

Communqiué de presse M. Jean-Pierre SUEUR, sénateur du Loiret, est intervenu au Sénat lors du débat, en seconde lecture, du projet de loi sur les responsabilités locales.

Il a notamment déploré que le gouvernement n’ait pas respecté les engagements pris par le Premier ministre pour ce qui est de la concertation avec les parlementaires et les élus locaux.

Il a déclaré, en particulier : « Nous avons le sentiment que c’est toujours demain qu’on donnera aux élus locaux de la République française les réponses qu’ils attendent sur les questions financières.

« En effet, lors de la réforme constitutionnelle, on nous a dit : « Rassurez-vous, ces précisions figureront dans la loi de finances pour 2004. » Mais, lorsque nous avons examiné la loi de finances pour 2004, on nous a certes présenté une nouvelle architecture pour la Dotation Globale de Fonctionnement – une belle architecture ! -, mais rien, absolument rien, ne nous a été dit en termes d’espèces sonnantes et trébuchantes ! « Ce sera dans la loi de finances pour 2005 ! », nous a-t-on rétorqué. Puis, changement de décor, on nous a demandé d’attendre la loi organique. […] Mais, quand nous avons vu arriver la loi organique, nous nous sommes rendu compte qu’elle était totalement vide et parfaitement tautologique ! » […]

« Aujourd’hui, aux élus locaux – qu’ils soient des régions, des départements, des communes ou des intercommunalités – qui nous interrogent sur les données financières dont ils peuvent disposer, que nous soyons de droite, de gauche ou du centre, nous ne savons pas quelle réponse donner, car il n’y en a pas ! » […]

« Je ne prendrai qu’un seul exemple, celui des hôpitaux. Il est prévu à l’article 54 du projet de loi que les régions pourront financer à titre expérimental des équipements sanitaires. Soyons réalistes ! Imaginons que cette loi entre en application l’année prochaine ou l’année suivante. Quelles sont les régions qui, avec les ressources qui sont les leurs aujourd’hui, pourront contribuer au financement, forcément très élevé, de tels équipements ?





« Soyons clairs : la plupart des régions ne le pourront pas. Et le fait que certaines y parviennent, parce qu’elles sont mieux dotées que les autres, aura une conséquence immédiate : on frappera à la porte des autres régions pour leur demander de faire la même chose pour tel centre hospitalier. Et quand on aura apporté un financement pour un hôpital dans une régions, il faudra en apporter pour tous les hôpitaux de la région. Mais avec quels moyens ? » […]

M. Jean-Pierre SUEUR a également critiqué les grandes complexités auxquelles conduirait ce texte, s’il était adopté : « Ce texte ajoute trente sortes de conventions différentes, qui répartiront de manière quelque peu aléatoire et désordonnée les compétences entre les différents niveaux de collectivités locales et l’Etat, sans parler de l’expérimentation, dont la durée est maintenant de neuf ans. »

« Si l’on y ajoute l’article 101 du projet de loi, qui permet à chaque département ou à chaque région de confier tout ou partie de ses compétences à un établissement public de coopération intercommunale, on constate que ce n’est plus la séparation des pouvoirs, chère à Montesquieu et qui fonde nos institutions, c’est la confusion des pouvoirs.[…] Il convient de définir ce qui relève de l’Etat républicain. Il ne peut s’agir seulement de ce qui reste, conformément à une conception résiduelle de ses compétences. Vous estimez que cette confusion est bonne, que la disproportion est profitable et l’inégalité bénéfique. Selon vous, des améliorations surgiront du désordre et cette république aléatoire aura en définitive quelque chose de bon. Pour notre part, nous ne le pensons pas du tout et considérons que, dans ce domaine comme dans d’autres, ce n’est pas le désordre qui produit le bien commun. […]

« L’une des raisons pour lesquelles nous ne voterons pas ce texte, c’est que la république aléatoire, c’est le royaume des puissants ! »

M. Jean-Pierre SUEUR a par ailleurs critiqué l’évolution de la position du gouvernement qui, en matière de développement économique, a donné son accord à une forte réduction des prérogatives des régions, contrairement à ce qui a été sa position constante lors de la première lecture. M. SUEUR a notamment noté que la phrase mentionnant la « responsabilité » de la région en matière de développement économique disparaissait et qu’au lieu d’avoir l’initiative de l’élaboration du schéma régional de développement économique, elle ne pourrait désormais que se voir « confier » par l’Etat le soin d’ « élaborer ce schéma » à titre exclusivement « expérimental ».

Tout en se prononçant pour une « coopération efficace entre régions, départements et agglomérations sur ce sujet », M. SUEUR s’est étonné d’un changement aussi radical de position du gouvernement, à la suite du résultat d’élections régionales qui lui ont été défavorables : « Ce qui était bon, et nécessaire, avant les régionales ne le serait donc plus ? Votre conception de l’Etat républicain est aussi variable que les compétences que vous prévoyez d’attribuer aux régions selon le résultat des élections ! Monsieur le Premier ministre laisse faire aujourd’hui l’exact contraire de ce qu’il prônait hier. »

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