Le point de vue de Jean-Pierre Sueur

Le Conseil d’agglomération doit décider le 12 juillet d’un « tracé » pour la seconde ligne de tramway. Le tracé concernant Orléans a déjà été présenté au Conseil municipal du 7 juillet. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet. Mais je souhaite faire part dès maintenant de quelques réflexions.
1. « Comment donner l’impression qu’on fait quelque chose quand on ne fait rien ? », telle est la question que me paraissent s’être posés les « décideurs » (si l’on peut dire !) d’aujourd’hui. Je rappelle que tout était prêt pour engager la préparation de cette seconde ligne en 2001. Elle aurait dû être achevée en 2005. Au lieu de cela, nous avons assisté à quatre ans et demi d’indécisions et d’inaction. On a cherché à nous imposer, pendant deux ans, un « bus guidé », puis durant deux années suivantes un « trolleybus sur pneu guidé par un rail unique ». Ce furent autant de fiascos. 90 % des habitants de l’agglomération se déclarant favorables au tram, nos « décideurs » ont donc suivi. Mais à une condition : que rien ne soit fait de concret ne soit fait durant le présent mandat municipal. Les « décideurs » étaient de farouches opposants au tram. Ils ont fait campagne contre lui lors des dernières élections municipales. Toute honte bue, ils le soutiennent aujourd’hui – tant mieux !- mais à condition qu’on ne fasse rien dans l’immédiat.
2. Les arguments financiers qu’on nous a opposés pendant quatre ans ne tiennent donc plus… puisque aujourd’hui on peut financer un tram. Et quand M. Grouard tente pathétiquement d’expliquer qu’à quatre ans près, ce qui était « radicalement impossible » hier est tout à fait possible aujourd’hui, on voit bien que cela ne tient pas debout, puisque – rappelons-le – le financement repose pour une part, sur des emprunts à quinze ou vingt ans et parce qu’en différant le projet, on a perdu la subvention de l’Etat (60 millions d’euros avaient été obtenus pour la première ligne) qui était acquise. Rappelons au passage que la première ligne a été très bien financée et qu’il n’y a pas eu de dépassement de coût. Pour la seconde, on prévoit un coût de 289 millions d’euros pour 11,8 km… contre 291 millions pour les 18 km de la première. C'est-à-dire 16,4 millions d’euros du kilomètre pour la ligne A… contre 24,5 millions pour la future ligne B. Chacun peut en juger.
3. Il ne faut pas induire nos concitoyens en erreur. Quand MM. Grouard et Lemaignen annoncent que le faubourg Madeleine, la rue de la Madeleine et la rue des Carmes seront en « site partagé » (c'est-à-dire que les voiture pourront circuler sur les voies du tram), ils annoncent quelque chose d’irréalisable. Et je pense qu’ils le savent. Cela ne sert à rien de construire un tramway s’il est constamment bloqué dans la circulation automobile et les embouteillages. Il n’y a pas de sens à réaliser un tram s’il est constamment retardé. Un tram ne peut fonctionner que s’il roule sur site propre (c'est-à-dire que un site qui lui est exclusivement réservé). Il est absurde de faire des promesses intenables. Il vaut mieux dire la vérité.
4. Il est, pour moi, essentiel que (contrairement à ce qui a été présenté) le matériel roulant - celui de la première ligne comme celui de la seconde - soit utilisable sur les deux lignes. Toute autre solution est très coûteuse. Et, en particulier, parce qu’il est indispensable de commander des rames supplémentaires pour la première ligne, compte tenu du succès de celle-ci et du nombre d’utilisateurs. Il serait beaucoup moins coûteux de commander cinq rames supplémentaires en même temps que celles nécessaires pour la seconde ligne, plutôt que d’acheter des rames de deux types différents. Qui plus est, avec des rames de même conception, le coût d’entretien et de maintenance est beaucoup moindre.
5. Pour ce qui est du tracé à l’intérieur d’Orléans, il est clair que chaque possibilité a (comme toujours) ses avantages et ses inconvénients. Pour avoir connu les débats à ce sujet lors de la préparation de la première ligne, je ne souhaite pas entrer dans une « guerre de religion ». Mais il m’apparaît que l’on a sous-estimé le double avantage que représente le passage par la gare d’Orléans.
- Celui-ci permettrait en effet une vraie « multimodalité », c'est-à-dire l’arrivée sur le même site, des deux lignes de tram, des trains, et bus et autocars. Il est clair que cela rendrait grand service aux usagers. Il faudrait, naturellement, penser la nouvelle gare ne fonction de cela : c’est ce que je demande depuis quatre ans.
- Celui-ci permettrait d’engager la rénovation des mails. Le passage du tram peut en être le moyen. Il est, en effet, très pénalisant pour Orléans et l’agglomération que les mails se soient transformés en une « pseudo-autoroute ». Il faut y retrouver une nouvelle convivialité.
6. Un dernier mot. On perd vraiment beaucoup de temps. Lorsque M. Grouard dit qu’il faudra le même temps pour faire la seconde ligne qu’il en a fallu pour réaliser la première, il ne dit pas la vérité. Le travail de préparation de la première ligne n’a commencé qu’en 1995 et elle a été mise en service en 2000. Les études préalables à 1995 portaient sur le réseau : elles traitaient donc tout autant de la première ligne que de la seconde. En s’y prenant de la même manière en 2001, on pouvait inaugurer la seconde ligne en 2005.

Thème : Textes sur Orléans