En 1990, lorsque les premières études concernant un transport en site propre ont été lancées, le SIVOM de l’agglomération orléanaise, qui a en charge les transports en commun, souhaitait développer un mode de transport en commun qui soit attractif pour une nouvelle clientèle mais qui puisse être aussi le vecteur d’un urbanisme de qualité.
Le réseau de bus, quelle que soit sa qualité, ne permettait pas, en effet, d’attirer de nouveaux clients. En outre, l’extension de ce réseau était handicapée par la configuration de l’agglomération d’Orléans. Les vingt communes de l’agglomération s’étendent en effet d’est en ouest et du nord au sud, sur plus de vingt kilomètres. Il s’agissait de créer un moyen de transport moderne et rapide, mais aussi de restructurer l’agglomération. Nous voulions lui donner une véritable épine dorsale, et mettre en oeuvre sur tout le trajet du tramway plusieurs opérations d’urbanisme ou de réaménagement urbain. C’est pourquoi, le projet du tramway a été l’un des éléments structurants du Schéma Directeur de l’agglomération.
Il faut penser que notre agglomération a connu deux ruptures majeures. Au XIXè siècle, d’abord, deux pôles urbains se sont organisés autour des deux gares, celle d’Orléans et celle de Fleury-Les-Aubrais. Au XXème siècle, une ville nouvelle, Orléans-La-Source, a été créée de toute pièce à 12 kilomètres de la mairie d’Orléans. Cette ville nouvelle a beaucoup grandi. Elle compte aujourd’hui 43 000 habitants dont 18 000 étudiants, une université, de nombreuses entreprises, des services publics, etc. La fonction du tramway sera de résorber ces “coupures urbaines”, de créer une continuité entre La Source, Olivet, Saint-Marceau, le centre-ville d’Orléans, le quartier Nord-Est et Fleury-Les-Aubrais.
Nous avons également privilégié très tôt la notion de réseau. Notre projet prévoit une première ligne Nord-Sud, dont les travaux ont commencé cet été, et une seconde ligne Est-Ouest. L’arrivée du tramway entraînera des modifications importantes du réseau de bus, ainsi que la création de nombreux parkings relais.
J’ajoute qu’à Orléans, comme en d’autres villes, l’arrivée du tramway permettra de rompre avec la logique du “tout automobile”, de mettre en oeuvre une meilleure complémentarité entre les différents modes de transport et de lutter contre la pollution, conformément aux objectifs de la loi sur l’Air.
La procédure d’enquête publique et l’obtention de la DUP ont pris plus de 18 mois. Qu’en pensez-vous ?
Je pense qu’il faut revoir les procédures qui sont devenus beaucoup trop lourdes.
Il faut réserver un temps suffisant pour une concertation qui doit être intense. Il faut que cette concertation soit faite alors que le projet n’est pas encore “bouclé”. Puis une fois une décision prise, il faut s’y tenir.
Dans le cas d’Orléans, l’enquête publique a été longue. Les commissaires enquêteurs ont fait deux “réserves”. La première consistait à préconiser de refaire un pont juste devant un pont du XVIIIe siècle, ce qui aurait été très préjudiciable pour le paysage et pour ce patrimoine exceptionnel. La seconde nous demandait de modifier un tracé au coeur d’un espace où il n’y a aujourd’hui personne... mais qui va demain être urbanisé autour du tracé du tramway. Pas un seul des représentants des 20 communes de l’agglomération au sein du SIVOM n’a soutenu ni l’une, ni l’autre de ces réserves... Mais, comme elles existaient, nous avons dû aller devant le Conseil d’Etat.
Et avant d’aller devant le Conseil d’Etat, il a fallu boucler “l’instruction mixte à l’échelon central” aux termes de laquelle nous avons dû obtenir l’accord de 18 ministères. Cela a également été long. Pourquoi ne pas déconcentrer cette procédure et confier au Préfet le soin de mener à bien une telle instruction ?
Ce ne sont que deux exemple qui me conduisent à une conclusion claire : il faut revoir et simplifier les procédures !
Vous êtes président de l’Association des Maires des Grandes Villes de France. Quelle place tient pour vous les transports en commun dans la ville de demain ?
En 1994, l’Association des Maires des Grandes Villes de France a publié un ouvrage qui se présentait comme un manifeste des grandes villes, Mon pays, c’est la ville. Déjà, à cette époque, alors que le développement des tramways n’était pas encore à la mode, un chapitre particulier était consacré à l’amélioration des transports en commun. Il était notamment proposé que “la politique des transports urbains apparaisse comme devant être non seulement une politique de déplacements urbains mais également et surtout comme l’un des éléments d’une véritable politique de la ville”.
Les transports en commun modernes sont en effet des liens indispensables pour maintenir l’équilibre urbain. Aujourd’hui, de nombreux quartiers sont relégués économiquement et socialement. Il ne faut pas les abandonner. Mais il ne faut pas non plus multiplier les “zonages”, qui accroissent trop souvent la stigmatisation de ces quartier. Il faut mener des politiques globales, à l’échelle des agglomérations. Dans ce cadre, le développement de transports en commun modernes peut contribuer également à restaurer cet équilibre, à qualifier des quartiers, à en donner une image valorisante.
C’est pourquoi, dans le rapport “Demain la Ville” que j’ai remis à Martine AUBRY en février dernier, j’ai souhaité qu’un grand effort soit fait en leur faveur. Les sommes affectés dans le budget de l’Etat aux transport en commun en site propre sont aujourd’hui de l’ordre de 700 millions de francs alors que la GART a évalué les besoins de financement pour les projets existants à 80 milliards de francs. On est loin du compte. C’est pourquoi, je me suis prononcé pour la réorientation d’une partie des crédits aujourd’hui affectés aux routes pour le développement des transports en commun modernes dans les agglomérations urbaine.
Thème : Textes sur Orléans