Jean-Pierre Sueur avait déposé en 2019 une proposition de loi sur les biens mal acquis. Celle-ci a été adoptée par le Sénat. Elle avait pour objet de faire en sorte que les biens issus de la corruption internationale confisqués par la Justice reviennent effectivement aux populations spoliées (populations des pays pauvres, le plus souvent).
Bien que le gouvernement se fût engagé à une adoption de ces dispositions pour fin 2019… cette proposition de loi attend toujours.
C’est pourquoi Jean-Pierre Sueur est revenu sur ce sujet lors du débat sur le budget de la Justice, évoquant notamment l’article de Patrick Lefas et Francine Lepany paru dans Le Monde du 3 décembre.
M. Jean-Pierre Sueur. – La corruption transnationale représente entre 20 et 40 % de l’aide mondiale au développement. Des pays pauvres sont honteusement pillés par leurs prétendues élites qui achètent des hôtels particuliers à Paris et sur la Côte d’Azur. L’an dernier, le Sénat a adopté à l’unanimité une de mes propositions de loi afin que les biens réquisitionnés par la justice aillent aux populations spoliées. La ministre Mme de Montchalin s’était engagée à ce que le sujet soit réglé en loi de finances. L’Assemblée nationale a voulu faire un rapport qui a abouti aux mêmes conclusions. Mais cette question est toujours paralysée. J’ai sollicité un rendez-vous auprès de vous et je serais heureux que vous puissiez nous recevoir pour débloquer cette situation. Dans l’affaire Obiang - le vice-président de la Guinée Équatoriale -, le tribunal de Paris a considéré que l’État ne pouvait « moralement » bénéficier de la confiscation des biens. Des associations, comme Tranparency International, se sont mobilisées. S’il y a une volonté, nous pourrons régler cette question.
M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. – Je comprends qu’il s’agit d’un amendement d’appel. Retrait ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. – Je suis sensible à cette question. Je connais bien ces dossiers pour y avoir été confronté dans ma vie antérieure, alors que je n’étais pas pharmacien (Sourires) Avis favorable à ce que nous nous rencontrions pour avancer le plus vite possible. Retrait ?
M. Jean-Pierre Sueur. – Je ne me prévaux de rien de moins que de l’unanimité du Sénat. Compte tenu de cette volonté commune, je retire cet amendement.
Anne Sylvestre nous laisse près de trois cents chansons, sans compter les Fabulettes (vingt CD), et quand on s’aventure dans son œuvre considérable, en feuilletant le catalogue des EPM (ou en regardant le site Internet), on retrouve nombre de chansons connues, reconnues, et on lit les titres de tant d’autres qu’il nous reste à découvrir. Depuis le cabaret de La Colombe jusqu’à ces derniers mois, Anne Sylvestre n’a jamais cessé d’écrire, de créer, de chanter : trois mille spectacles, soixante ans de chansons. Durant ses récitals, elle était là, proche de nous. Elle l’est encore. « Y a-t-il une vie après le théâtre ? » demande-t-elle dans l’un de ses textes : quand elle était sur scène, elle était entière, simple, directe. Qu’importe si le nombre de musiciens était réduit – il n’y en eut parfois qu’un seul –, son public l’aimait. Ce public, il s’est d’ailleurs renouvelé, de génération en génération, avec les nombreux Rescapés des fabulettes pour reprendre le titre de la seule chanson pour « adultes » où elle évoque son autre répertoire.
Anne Sylvestre ne voulut jamais être une « chanteuse engagée » (elle l’a dit, ou plutôt elle l’a chanté) Elle a été, et elle reste, une chanteuse à fleur de vie, riche de tant d’observations, de constats tristes ou beaux, de révoltes et d’interrogations. Et c’est tellement plus fort !
Je ne prendrai que quelques exemples… Il y a dans son œuvre l’amour bien sûr, l’amour sublime de Lazare et Cécile, l’amour intermittent, qu’elle magnifie dans Belles parenthèses, et l’amour en rade (Ah, l’amour, l’amour). Il y a l’amitié (Les amis d’autrefois). Il y a la dureté des relations entre les êtres (Maryvonne), la grande humanité aussi (J’aime les gens qui doutent). Il y a la guerre d’Algérie (Mon mari est parti), le patrimoine (Les cathédrales). Il y a le féminisme, bien sûr, un mot auquel elle est toujours restée fidèle (Une sorcière comme les autres, Clémence en vacances, Mon mystère, Juste une femme). Il y a le combat pour l’intervention volontaire de grossesse (Non, tu n’as pas de nom), celui pour le mariage de personnes du même sexe (Gay, marions-nous). Il y a les sujets sociaux et les malheurs de ses amis artistes (La java des assédiques). Il y a le Québec (Dis-moi Pauline). Il y a l’écologie (Un bateau mais demain, Le lac Saint-Sébastien). Et la réponse aux caricatures d’une chanteuse prétendument ruraliste (Les pierres dans mon jardin). Il y a la fin du monde (Le jour où ça craquera). Et la drôlerie, une drôlerie pleine d’esprit (liste non exhaustive : Les punaises, Lettre ouverte à Élise, La reine du créneau, Petit bonhomme – à ranger dans la rubrique « féminisme » aussi ! –, Les blondes, Trop tard pour être une star, Parti partout, etc.)
J’arrête… car je pourrai continuer encore, tant Anne Sylvestre a beaucoup dit et chanté. Je finirai par un vœu sincère : que paraisse bientôt une intégrale de son œuvre. Ce serait un bonheur !
JPS
La liberté de la presse est essentielle. Sans elle, pas de démocratie. La loi de 1881, qui la garantit, est précieuse entre toutes. Il est des lois qui sont des symboles. Il ne faut y toucher qu’avec une « main tremblante » et sans doute est-il mieux de ne pas y toucher.
L’article 24 de la proposition de loi dite « sécurité globale », tel qu’il a été voté par l’Assemblée Nationale, met évidemment en cause la liberté d’expression et la liberté de la presse. Nous en avons eu la preuve par l’absurde. Si les faits n’avaient pas été filmés lors de « l’évacuation » de migrants place de la République à Paris, Gérald Darmanin n’aurait pas pu dire qu’il avait vu des « images choquantes » et si les violences faites à Michel Zecker n’avaient pas été filmées, Emmanuel Macron n’aurait pas exprimé sa « honte » devant de telles images.
François Hollande, qui a connu une situation où il a dû revenir en arrière – il s’agissait de la « déchéance de nationalité » – a fait à cet égard une déclaration très juste. Je cite : « Il y a plus d’honneur à retirer un texte quand il heurte les consciences et divise la société qu’à le maintenir quand le risque majeur est de créer de l’incompréhension et de provoquer la violence. Le seul apaisement possible est le retrait. »
J’ajoute que l’idée de créer une commission constituée de personnes nommées – aussi honorables soient-elles – pour réécrire la loi entre son examen par l’Assemblée et le Sénat est contraire à l’esprit de nos institutions. C’est le Parlement qui fait la loi. Les présidents de deux assemblées ont dénoncé ce procédé. On nous a depuis vendu que ladite commission ferait autre chose… sans convaincre pour autant, c’est le moins qu’on puisse dire !
Je me suis exprimé là-dessus en séance publique au Sénat ce samedi après-midi. La vidéo de mon intervention figure ci-dessous. Je suis clair : il faut supprimer cette commission comme cet article 24.
Il faut garantir pleinement la liberté d’expression et la liberté de la presse. Il faut aussi protéger les policiers et les gendarmes quant aux menaces dont ils peuvent être l’objet, ce que des dispositions législatives permettent déjà. Tout cela – comme l’ensemble du texte de la proposition de loi, au-delà de l’article 24 – demande un vrai travail parlementaire. Avec mes collègues, j’y prendrai toute ma part.
Jean-Pierre Sueur
>> Le texte de mon intervention
>> La vidéo de mon intervention